mardi 27 novembre 2007

Comment s'inviter chez les blaireaux : l'affût


Y'a vraiment rien à la télé ? Passez une nuit chez les blaireaux...

Naturellement, préférez la chasse aux images, enivrez-vous d’instants magiques, intenses, faites-vous de merveilleux souvenirs… Ceux qui possèdent quelques talents pourront également essayer de mettre en boîte (argentique ou numérique) le farouche animal ou, suivant la piste du maître es bêtes, Robert Hainard, pratiquer la « chasse au crayon »… Voici, l’air de rien, quelques petits conseils pour s’inviter à l’improviste chez nos meilleurs amis. Ou comment mettre toutes les chances de son côté pour réussir un affût au blaireau.

Un affût, ça se prépare ! Aucune chance si on y va au pif (car, on l’a vu, celui du blaireau est bien plus aiguisé que le nôtre). Un bon repérage s’impose... Il vous faudra trouver le meilleur endroit où vous installer confortablement le soir venu, et pour cela avoir localisé précisément un terrier habité par le tesson et sa famille. Explorez donc votre coin de campagne favori et localisez sur une carte au 1/25000 quelques villages de blaireaux. Cette découverte peut se faire en famille, c’est un but pour de belles randonnées naturalistes ; jumelles autour du cou, vous vivrez peut être une rencontre avec un écureuil, un pic épeiche, un renard en vadrouille, un chevreuil bondissant… ou profiterez simplement des premières fleurs des bois et des chants d’oiseaux au printemps.

Ca y est, votre choix est arrêté sur un site ? S’il s’agit d’un terrain privé, pensez à avertir le propriétaire de votre présence, afin d’éviter quelques désagréments… L’endroit doit être accessible à pied. Si vous utilisez la voiture, prévoyez de garer votre véhicule à un petit kilomètre, de manière à faire une marche d’approche la plus discrète qui soit. En bon « trappeur », vous être maintenant certain de la présence régulière du compère blaireau : coulées, terrier visiblement occupé, empreinte identifiée… Préférez un terrier qui ne possède pas trop d’entrées, dans un site environné d’un sous-bois clair, de façon à profiter d’une vue dégagée… A quelques mètres de la gueule, un tronc d’arbre à l’air idéal pour faire un dossier confortable, parfait. Les casse-cou pourront s’installer en hauteur dans un arbre, leur odeur n’en sera que moins discernable par les méfiants mustélidés !

Il est toujours possible d’aller affûter « les mains dans les poches »… Cependant, une petite préparation matérielle vous aidera à réussir votre soirée. Tout d’abord, l’habillage : déguisez vous en tronc d’arbre ! Choisissez des vêtements qui ne craignent rien, d’une couleur vous assurant un certain mimétisme dans la nature, amples et confortables, et qui ne font pas de bruit… (Evitez absolument certains tissus synthétiques, genre K-Way, qui pourrait vous jouer un vilain tour si vous bougez!) Et pensez à vous habiller chaudement, car il vous faudra rester immobile longtemps…

Voici l’équipement de base du parfait mammalogiste : carnet, crayon, paire de jumelles et lampe torche. Un petit coussin ou un siège pliable, voire une couverture, peuvent vous faire gagner un peu de confort et donc d’éviter des mouvements d’aisance. Une paire de jumelles est utile, surtout lors des longues journées d’été, car les blaireaux sortent alors avant le crépuscule, et l’on peut profiter d’encore un peu de lumière pour faire des observations passionnantes. Préférez un modèle lumineux et peu encombrant, des 7 x 42 par exemple. La lampe doit être d’intensité moyenne ; on peut éclairer les blaireaux dans les bois, j’en ai fait l’expérience, la lumière ne les dérange pas, beaucoup moins qu’un bruit soudain ou qu’une odeur inhabituelle.


Le grand soir !

Prévoyez d’arriver à votre poste d’affût environ 1 heure avant le coucher du soleil, et 2 heures en été. Avant de partir, prévenez quelqu’un et dites où vous allez exactement, on ne sait jamais ! Conseils qui paraissent évident, bannissez le tabac (les animaux associent l’odeur de la fumée à celle de l’homme, et de très loin !), pensez à éteindre le portable et… oubliez de vous parfumer ! Pour cette soirée mondaine, vous verrez, les blaireaux ne vous en tiendront pas rigueur, au contraire !

C’est le moment de mettre en pratique quelques ruses de sioux : votre itinéraire étant bien repéré, faites une entrée la plus discrète possible. Evitez surtout de passer juste devant les gueules, vous réduiriez à néant toute chance d’apercevoir l’animal. « Prenez le vent », en humectant votre doigt pour connaître sa direction, et placez vous en conséquence, de manière à ce que les blaireaux ne perçoivent pas votre odeur. Installez vous confortablement, puis… transformez vous en statue ! Yeux et oreilles en alerte, faites preuve de la plus grande patience…


Séquence… émotion !

Là ! Une tête noire et blanche bouge, vous entendez renifler… Maître Tasson pointe enfin le bout de son museau, c’est le moment où il est le plus circonspect… Gardez votre sang froid, il ne faut pas bouger d’un poil et ne faire aucun bruit. Le moment est si intense qu’on se demande si on a encore le droit de respirer… Carpe Diem ! Observez… Laissez le blaireau commencer son petit manège, gratouilles, ménage… avant de se décider à partir le long de ses petits chemins pour trouver à manger. Des congénères peuvent le rejoindre ; avec de la chance, vous pourrez même avoir droit aux batifolages des blaireautins de l’année !

Pour profitez des jumelles ou allumer la lampe torche, pas d’affolement… Ayez des gestes d’une extrême lenteur, et tout se passera bien. Le blaireau n’a pas une bonne vue, souvenez vous. S’il vient vers vous, il se peut même qu’il se retrouve contre vos chaussures ! Rassurez vous, il ne vous attaquera jamais. Si malheureusement vous êtes repéré (arrgh, ces fourmis dans les jambes !), le méfiant animal rentrera vivement au terrier… Mais l’affût n’est pas pour autant fini. Restez calme, attendez… Il y a encore une chance qu’il remette le nez dehors, dès qu’il sera rassuré. Et que le spectacle continue un petit moment…

Finalement, nos compères se sont éloignés et il fait noir, et froid. Il est temps de rentrer… Quitter votre affût avec autant de discrétion que lors de votre arrivée. Il se peut aussi que vous ayez attendu plus d’une heure sans voir un seul blaireau… Vous rentrez bredouille à la maison. Le mustélidé a été plus rusé que vous, il a du vous entendre venir avec vos gros sabots ! Peu importe, ne vous découragez pas, recommencez une autre nuit… Il peut s’avérer utile de débuter avec un naturaliste expérimenté mais, par expérience, on augmente ses chances si on est seul (les humains sont terriblement bavards !). Essayez peut être devant une autre gueule (on est jamais certain de la fréquentation des terriers, et ceux-ci comportent de nombreuses entrées) ou faites un nouveau repérage pour un prochain affût. Un jour, vous finirez bien par les voir, ces satanés blaireaux !

Bonne chance, et bonnes observations…




1 commentaire:

Lalie Solune a dit…

Merci pour ce reportage-conseil ! :)